À peine plus de la moitié des électeurs togolais se sont rendus aux urnes samedi pour élire leur président, un scrutin à un tour dont Faure Gnassingbé, le chef de l’État sortant, héritier d’une famille au pouvoir depuis 48 ans, est favori.
Au total, quelque 3,5 millions d’électeurs étaient appelés aux urnes. Mais selon la Commission électorale nationale indépendante (Céni), le taux de participation de l’élection présidentielle de samedi a avoisiné les « 53 à 55% », une mobilisation a priori bien inférieure à celle de la présidentielle de 2010 (près de 65%).
« Dans l’ensemble, les élections se sont déroulées dans la sérénité et dans le calme. Le seul constat fait, c’est qu’il y a moins d’affluence par rapport au scrutin précédent », a estimé à la télévision nationale le ministre de l’Administration territoriale, Gilbert Bawara. M. Gnassingbé, qui brigue un troisième mandat, a pour principal adversaire Jean-Pierre Fabre, le candidat du CAP 2015 (Combat pour l’alternance politique), une coalition de plusieurs partis d’opposition.
Malgré le ras-le-bol d’une partie de la population, l’opposition, qui aligne quatre candidats et dont une partie boycotte le scrutin a, selon les experts, peu de chances de l’emporter. Le Togo a été dirigé d’une main de fer pendant 38 ans par le général Gnassingbé Eyadéma, et est gouverné depuis 10 ans par son fils Faure Gnassingbé, porté au pouvoir par l’armée à la mort de son père.
Dimanche à la mi-journée, aucun résultat, même partiel, n’avait été annoncé. M. Gnassingbé avait déclaré à la presse samedi que « quelques tendances » devraient être publiées dans la nuit de samedi à dimanche, mais selon son président Taffa Tabiou, la Céni est encore en train de « comparer » les résultats obtenus « de plusieurs sources » afin de s’assurer que les estimations publiées « reflètent la réalité ». La Céni a six jours pour donner les résultats définitifs.
Risques de fraude « réduits » ?
Le logiciel de compilation des résultats, contesté par l’opposition, « n’a pas été abandonné », contrairement aux déclarations de M. Fabre samedi, a déclaré M. Bawara. Mais un « comité d’accompagnement », composé de représentants des cinq candidats et d’observateurs, a été mis en place vendredi avec pour « mandat de suivre de façon pointue et soutenue toutes les opérations de remontée, de traitement et de publication des résultats », a ajouté le ministre.
M. Fabre avait estimé samedi que « les risques de fraude » étaient « réduits » pour cette élection, une première dans un pays où l’opposition a contesté les résultats de tous les récents scrutins, dont ceux des présidentielles de 2005 et 2010.
Si la présidentielle de 2005, entachée de fraudes, a été marquée par des violences (400 à 500 morts selon l’ONU), celle de 2010, jugée acceptable par la communauté internationale, s’était déroulée dans un calme relatif.
M. Fabre, déjà le principal rival de M. Gnassingbé, avait obtenu 33,93% des suffrages contre 60,88% à son adversaire. Sanctionné pendant des années par les bailleurs de fonds étrangers pour « déficit démocratique », le Togo, qui compte sept millions d’habitants, affiche aujourd’hui une croissance économique annuelle de près de 6%. Mais malgré la politique volontariste de développement menée ces dernières années et mise en avant par M. Gnassingbé lors de la campagne électorale, les Togolais, qui sont toujours plus de 50% à vivre sous le seuil de pauvreté, et 29% au chômage selon le gouvernement, disent ne pas profiter des retombées de la croissance.
A Lomé, la capitale et le poumon économique du pays, historiquement acquise à l’opposition, les électeurs, étranglés par la cherté de la vie et le manque de travail, sont nombreux à souhaiter l’élection de M. Fabre. Mais dans le reste du pays, et notamment dans les campagnes, nombreux sont ceux qui préfèrent opter pour le régime en place, qu’on connaît, plutôt que pour l’opposition, dont on se méfie.
AFP