Le président du Mouvement Populaire Démocratique de Guinée (MPDG), Siaka Barry a animé ce mardi 8 septembre 2020 à Conakry une conférence de presse afin de se prononcer sur les élections présidentielles du 18 octobre 2020. A l’occasion, une résolution finale a été lue par le président du MPDG.
Résolution : « La vie des nations comme dans celle des êtres humains est souvent ponctuée de périodes charnières qui constituent des tournants cruciaux lui permettant d’effectuer de profondes mutations en vue de sa qualification ou de sa survie. Notre pays, la Guinée, berceau de plusieurs civilisations séculaires, ayant toujours eu rendez-vous avec l’histoire, n’a malheureusement pas su capitaliser une véritable mue, tant sur le plan économique, social, que politique, afin d’amorcer un développement harmonieux, profitable à toutes ses filles et fils sans exclusif.
Combien de fois, au détour d’un avènement ou d’un évènement historique, nous sommes-nous surpris, nous guinéens, à rêver enfin d’un nouveau départ pour une transformation qualitative, radicale de notre nation ? Pourtant, au gré d’une histoire tumultueuse, chaque génération de guinéens a eu son jour de rêve brisé, d’espoir déçu et d’espérance effritée, tant et si bien que notre pays est affublé aujourd’hui du qualificatif ô combien de fois humiliant de « pays des rendez-vous manqués ».
Devant cette avalanche d’échecs et de déceptions, il serait très hasardeux de crier haro sur une entité, couche sociale ou composante de notre nation, tant il reste vrai que les responsabilités sont collectives et très souvent partagées. Toutefois, ce qu’il est convenu d’appeler aujourd’hui « le désastre guinéen », s’il a des ramifications complexes et inextricables, trouve surtout son terreau fertile au sein d’une élite intellectuelle et politique de plus en plus corrompue et prébendière.
Ce qui pose la lancinante question d’une refondation totale du système politique, administratif et économique de notre pays, par une véritable révolution qui donnera naissance à un « guinéen nouveau » dans une « nation guinéenne nouvelle ».
C’est fort de ce crédo, que des jeunes patriotes guinéens, assoiffés de révolution et révoltés par l’injustice sociale, par la pauvreté ambiante des masses populaires et surtout par l’inconséquence de la «vieille garde politique » corrompue et avilie, se sont donnés les mains pour porter sur les fonts baptismaux le Mouvement Populaire Démocratique de Guinée (MPDG).
Ce nouveau parti est dans une dynamique nouvelle, impulsée par des femmes et des hommes, en majorité jeunes, qui travaillent à concevoir et mettre en œuvre un projet de société novateur et révolutionnaire qui constituera une sorte de viatique et de pacte avec le vaillant peuple de Guinée, dans le strict respect des valeurs cardinales d’unité nationale, de cohésion sociale et de démocratie vraie.
Voilà pourquoi, c’est avec une forte inquiétude et une profonde appréhension que nous avons assisté, à notre corps défendant, aux assauts répétés contre notre jeune démocratie, entravant ainsi son appareil moteur qu’on appelle l’alternance. Dans notre pays, la Guinée, le domaine politique s’est désormais affranchi de la morale, de l’éthique et de la probité. La pratique politique de nos jours en Guinée, rime désormais avec la division, la ruse, la fourberie, le mensonge, la démagogie, l’inconstance, l’achat des consciences, les promesses fallacieuses, la corruption, la rapacité, le reniement des valeurs et des convictions, et enfin le perpétuel retournement des vestes. Oui, la morale a foutu le camp du champ politique guinéen. Or, comme le disait André Malraux : « On ne fait pas de politique avec la morale, mais on n’en fait pas d’avantage sans la morale ».
Pour revenir au contexte politique actuel, notre parti le MPDG, soucieux de la défense des valeurs démocratiques, s’est très tôt inscrit dans le combat contre le tripatouillage constitutionnel visant à asseoir un pouvoir autocratique ad vitam aeternam. Cela fait de nous en avril 2019, un membre fondateur du FNDC (Front National de Défense de la Constitution) aux côtés d’autres partis politiques et de la société civile. Mais, faut-il le rappeler, bien avant cette date, le leader du parti (en ma modeste personne) avait été l’un des rares précurseurs de cette noble lutte, en lançant en 2017, à la suite de Mr Kèlèfa Sall (le défunt Président de la Cour Constitutionnelle) une alerte précoce contre les velléités déjà perceptibles à l’époque, d’atteinte à notre constitution.
Pourtant, tout en reconnaissant la noblesse du combat du FNDC, nous avons très tôt dénoncé ses mauvais choix stratégiques, notamment son recours abusif aux manifestations intempestives (qui épuisait ainsi nos précieuses énergies avant l’heure du combat) et surtout son refus naïf et suicidaire de participer aux élections législatives du 22 mars (en flagrante contradiction avec la constitution de 2010 que le FNDC est censé défendre), ouvrant ainsi un boulevard au régime actuel pour imposer son référendum macabre. Cette faute stratégique élémentaire mais lourde de conséquences, induite par des partis traditionnels en panne d’inspiration, scellera définitivement le divorce du MPDG avec le FNDC.
Aujourd’hui, au moment où la vraie bataille pour contrer le 3e mandat devrait normalement gagner en ampleur et en intensité, certains partis politiques dits « majeurs » (notamment l’UFDG d’El Hadj Cellou Dalein Diallo), dans un calcul opportuniste et égoïste, viennent d’assener le coup de grâce au FNDC en reniant toutes les valeurs qui ont fondé ce combat, à travers leur cautionnement d’un scrutin inique, qui légitimera le 3e mandat du Président Alpha Condé, et validera in fine la nouvelle constitution de 2020 qui régira la prochaine élection présidentielle du 18 octobre 2020.
C’est pourquoi, nous exprimons ici (haut et fort) notre indignation et notre réprobation face à la démarche égoïste et machiavélique de ces partis politiques membres du FNDC (notamment l’UFDG), qui, après avoir exposé inutilement la vie des dizaines de jeunes guinéens innocents, aux balles meurtrières des forces de répression, retournent aujourd’hui leurs vestes pour adouber un processus électoral qu’ils combattaient naguère, en présentant leur candidature à une élection qu’ils savent perdue d’avance et porteuse de germes conflictogènes pour notre nation.
En ce qui nous concerne au MPDG, fort de notre conviction patriotique révolutionnaire, et de notre foi inébranlable aux valeurs démocratiques et aux vertus de l’état de droit, notre base, a décidé après un exercice démocratique périlleux pour l’unité de notre jeune parti, de rejeter toute participation à la prochaine élection présidentielle qui, selon nous, au lieu de consolider notre jeune démocratie et la liberté qui nous sont tant chères, leur portera une blessure profonde. Or, comme le disait le Président François Mitterand : « il n’est pas de bonnes blessures pour la liberté, elles sont toutes mortelles… » !
Dans la même logique, les comités de base, les sections, fédérations, organes centraux et le Bureau Politique National du MPDG, se sont majoritairement prononcés contre l’alliance sollicitée par le parti au pouvoir le RPG-Arc en Ciel, tant que ce parti, par ses faits et méfaits, s’inscrira dans le sens contraire de l’histoire, et érigera des entraves sur le noble chemin de l’alternance démocratique en Guinée. Ce choix courageux et audacieuse fut une décision difficile à prendre pour le MPDG tiraillé entre ses intérêts propres du moment et l’intérêt supérieur de la nation. Car devant des propositions pécuniaires attrayantes et des offres carriéristes alléchantes, nous au MPDG avons résolument fait le choix de notre dignité, de notre honneur et de notre probité morale en gardant une foi inébranlable en l’avenir et en notre patrie, la Guinée. Et comme pour paraphraser le grand Syli, le camarade Ahmed Sékou Touré, nous disons que : « nous préférons la défense de la démocratie dans un combat patriotique difficile, à la défense de nos intérêts individuels, égoïstes et carriéristes, dans le reniement de la vérité et de nos valeurs ».
Peuple de Guinée, toi qui aspires légitimement au bonheur et au progrès social, ne désespère pas dans ton difficile combat de restauration de la démocratie, de la liberté et de l’état de droit, toi qui sembles vivre dans un éternel recommencement sysiphéen, en butte aux écueils et obstacles dressés sur ton chemin par tes propres élites politiques et intellectuelles, redresse toi peuple fier de Guinée, tiens-toi droit inlassablement dans ton combat libérateur, pour que notre pays la Guinée, soit résolument une Guinée DEBOUT ! ».