A l’appel du collectif Black lives matter, au moins un millier de personnes ont manifesté ce samedi après-midi à Paris pour réclamer justice, suite à la mort d’Adama Traoré lors de son interpellation par les gendarmes, à Beaumont-Sur-Oise.
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A Paris,
Il est tout juste 14h00. La chaleur est étouffante en ce début d’après-midi à la Fontaine des innocents, dans le 1er arrondissement de Paris. Malgré tout, la place est bondée de monde prêt à manifester. Au moins un milliers de personnes a répondu à l’appel du collectif Black lives matter, en référence au mouvement des Etats-Unis, pour réclamer justice suite à la mort d’Adama Traoré, lors de son interpellation par les gendarmes, à Beaumont-sur-Oise. Complètement encerclé de toute part par les CRS, les protestataires, qui dénoncent une nouvelle bavure policière, réfutant les affirmations des autorités, selon lesquelles Adama est mort d’un malaise cardiaque, ne sont pas intimidés. Au contraire ils crient régulièrement de toutes leurs forces, le poing levé en l’air : « Black Lives matter » (La vie des Noirs comptent). Même si ce mouvement est née aux Etats-Unis, suite à la multiplication des bavures policières contre la communauté afro-américaine, « on ne doit pas perdre de vue qu’en France aussi les crimes racistes sont fréquents », s’écrie de sa voix grave Franco Lollia, dirigeant de la Brigade anti-négrophobie, face à une foule qui l’écoute silencieusement, la mine très grave.
« Les jeunes cassent tout parce qu’ils savent que justice n’est jamais faîte »
« Nous sommes en guerre ! Oui, en guerre contre le racisme d’Etat », s’écrie le jeune homme charismatique, qui n’hésite pas à donner de la voix pour être entendu de tous. « Ce n’est pas étonnant que les jeunes cassent des voitures. Vous savez pourquoi ils cassent ? Tout simplement parce que des vies sont perdues et que justice n’est jamais faîte ! Voilà la vrai raison de leur colère ! », lance Franco.
Il présente aussi aux contestataires Ramata Dieng, sœur de Lamine Dieng, tué en 2007 après son interpellation par la police dans des circonstances troubles. Le regard grave, elle prend à son tour le micro pour s’exprimer. « Ils ont tué mon frère mais ont maquillé son meurtre en affirmant qu’il est mort d’une overdose de drogue et d’alcool ! », explique-t-elle. « Mais nous avons mené une enquête indépendante qui a démontré que Lamine est bien mort sous leurs coups ! Il a été molesté pendant près de 30 minutes. Ils l’ont aussi menotté aux chevilles et au moins huit policiers se sont acharnés sur lui ! Son corps était couvert d’hématomes », affirme-t-elle. « Tous les habitants aux alentours ont affirmé avoir entendu ses cris tellement la douleur était insupportable ! Lamine a même vomi et a respiré son vomi qu’on a retrouvé dans son appareil respiratoire. Il n’y a pas de doute, cela a été prouvé scientifiquement, c’est bien eux qui l’ont tué mais la justice a toujours donné des non lieux malgré le fait qu’on ait fait appel plusieurs fois. Aujourd’hui nous avons mené l’affaire devant la Cour de cassation mais avec peu d’espoir que notre requête aboutisse », déplore Ramata. « Alors dîtes moi ce qu’il faut faire pour que justice soit faîte. Moi je n’ai pas la réponse. Que faut-il faire pour que les crimes des policiers soient reconnus ? Une chose est sûr nous ne lâcherons jamais ! Nous irons jusqu’au bout pour obtenir la justice ! », conclut-elle sous un tonnerre d’applaudissement.
« Pourquoi chaque fois qu’un Noir meurt aux mains de la police, on parle de crise cardiaque », se questionne pour sa part Amobé Mevegue, propriétaire de la chaîne de télé Ubiznews. « Il y a une vrai inégalité menée par la police française dans son traitement des gens en fonction de leurs origines ou couleur de peau. Combien de fois j’ai été fouillé alors que je n’avais rien fait ! Si ça continue on va vraiment finir par se révolter un jour car ça ne peut plus continuer comme ça ! », affirme à son ami ce jeune homme noir, très grand de taille, qui a aussi tenu à participer à la manifestation pour dénoncer les injustices policières.
« Papa Hollande ou t’es ! »
Une manifestation pacifique, sans incident, toutefois sous le regard très attentif des CRS. Après 4h de rassemblement, il est déjà 18h00. Franco Lollia, leader du mouvement, annonce la fin de la protestation. Mais avant, cela il demande à tous de scander « justice » après le nom de chacune des victimes de la police qu’il nommera. En prenant soin de n’oublier personne, le jeune homme nomme au fur et à mesure Zyed et Bouna, les deux jeunes de Clichy Sous Bois, morts électrocutés dans un transformateurs d’EDF en fuyant la police. Mais aussi Laramy et Moushin décédés à Villiers le Bel en 2007, suite à une course poursuite avec des policiers. Ou encore Adama Traoré, Lamine Dieng et bien d’autres… Tous ont péri dans des circonstances toujours non élucidés. « C’est la dernière fois qu’un frère tombe ! C’est la dernière fois ! », s’écrie Franco face aux CRS, comme pour donner un avertissement, avant que la foule ne se mette à entamer le même chant avec vigueur. Franco, qui n’en a visiblement pas fini avec les CRS, s’adresse de nouveau à eux : « Avant que l’on se disperse, n’oubliez pas de demander à Papa Hollande où il est ! Papa Hollande où t’es », lance t-il avec ironie, en faisant référence à la célèbre chanson du chanteur belge Stromae, provoquant les rires des protestataires qui se mettent tous à chanter en cœur : « Papa Hollande ou t’es ! ».
Une chose es sûr. Le collectif n’en restera pas là et compte bien organiser régulièrement des manifestations massives comme celle-ci pour que les injustices dont souffrent les Noirs partout dans le monde, au Brésil, en Europe, aux Etats-Unis, dans le monde arabe…cessent une bonne fois pour toute…
Afrik.com