Le Sénégal attendait samedi le nom du successeur du Premier ministre Aminata Touré, limogée moins d’une semaine après sa défaite à Dakar à des élections locales marquées par une victoire en demi-teinte pour la coalition autour du président Macky Sall.
Plusieurs noms circulaient samedi dans la presse privée locale comme possibles remplaçants d’Aminata Touré, 51 ans. Nommée Premier ministre le 1er septembre 2013, elle n’aura occupé ces fonctions que dix mois.
Parmi ses potentiels successeurs, le quotidien Le Populaire cite les ministres sortants Augustin Tine (Forces armées), Abdoulaye Daouda Diallo (Intérieur), Aly Ngouille Ndiaye (Industrie et Mines), Amadou Bâ (Economie et Finances) et Mohamadou Makhtar Cissé (Budget). Ce dernier est aussi donné comme « pressenti à la Primature » par le site Leral.net. Il figure également sur la liste de Walfadjri, de même qu’Amadou Bâ. En revanche, aucun média public n’avait fait de pronostic.
Le limogeage d’Aminata Touré a été annoncé vendredi dans un laconique décret du président Sall qui, selon un communiqué de la présidence, lui a rendu hommage « pour son dévouement à ses côtés » et l’a félicitée « pour le travail accompli dans la quête d’un nouveau devenir pour le peuple sénégalais ».
Macky Sall est par ailleurs le chef de l’Alliance pour la République (APR), parti dont Aminata Touré est une des responsables.
Aucune explication n’a été fournie au limogeage d’Aminata Touré, intervenu moins d’une semaine après les élections municipales et départementales du 29 juin.
À Grand-Yoff, commune de la capitale sénégalaise, la liste dirigée par Aminata Touré a été devancée par une coalition dissidente emmenée par le maire sortant de Dakar Khalifa Sall, selon la presse locale.
Victoire en demi-teinte pour la majorité présidentielle
Les résultats officiels des élections locales étaient toujours attendus samedi matin. D’après des chiffres rapportés par de nombreux médias locaux, l’APR a perdu de grandes villes comme Dakar et plusieurs ministres ont été battus dans leurs circonscriptions.
Toutefois, la coalition au pouvoir, appelée « Benno Bokk Yaakaar (BBY, « Ensemble pour le même espoir » en langue wolof) aurait gagné dans plus de 70% des circonscriptions électorales du pays (475 circonscriptions électorales sur 602, avec un taux de participation autour de 40%). Ce qui en fait une victoire en demi-teinte pour la majorité présidentielle.
La coalition BBY est allée aux locales divisée dans de nombreuses circonscriptions où ses responsables ne sont pas parvenus à s’entendre sur des listes communes. BBY a été défaite par l’opposition notamment à Thiès (ouest), Ziguinchor (sud) et Touba (centre). Dans cette dernière ville, le scrutin a été remporté par le Parti démocratique sénégalais (PDS) d’Abdoulaye Wade qui a dirigé le Sénégal douze ans avant d’être battu en mars 2012 à la présidentielle par Macky Sall.
L’ex-président Wade, rentré fin avril au Sénégal après près de deux ans passés en France, a sillonné le pays pour soutenir le PDS, qui contrôlait une majorité de collectivités locales après les locales de 2009. Mais son renfort n’a pas permis à son parti de distancer ses adversaires.
Un adversaire « plus fort qu’elle »
Parmi les sympathisants d’Aminata Touré, on estime qu’elle a perdu à Grand-Yoff face à un adversaire « plus fort qu’elle » et que sa défaite n’aurait pas dû conduire à son limogeage. Selon l’un d’eux, « même Macky Sall n’aurait pas fait le poids devant Khalifa Sall », maire généralement bien apprécié des Dakarois.
Avec le scrutin du 29 juin, l’APR, qui existe depuis fin 2008, espérait renforcer ses bases malgré un contexte difficile de grogne sociale.
Si le président Sall « avait fait de ces élections un test grandeur nature de sa popularité, il peut constater que les grandes villes à forts réservoirs électoraux lui ont tourné le dos », note le journaliste Momar Seyni Ndiaye du site d’informations SenePlus (privé).
Depuis l’arrivée au pouvoir de Macky Sall, le pouvoir a pris des mesures pour atténuer les difficultés des ménages, en baissant les prix des denrées de base, des loyers, l’impôt sur le salaire, et en instituant une assurance-maladie universelle et une allocation trimestrielle pour les familles les plus pauvres.
Mais de nombreux Sénégalais estiment que peu de choses ont changé dans leur vie quotidienne depuis un peu plus de deux ans et que les réformes promises ne se déroulent pas à la cadence voulue.