Au pied des dunes qui entourent Nouakchott, hommes et femmes se retrouvent, chaque soir, autour d’une viande grillée et d’un thé, pour un moment de détente. Les dernières lueurs du jour viennent caresser le toit des khaïmas, ces tentes traditionnelles emblématiques de la Mauritanie.
Aujourd’hui, le mode de vie nomade, jadis ancré dans certaines communautés du pays, a évolué. Les populations se sédentarisent de plus en plus et habitent désormais dans des maisons plus conventionnelles. Malgré tout, ces tentes restent un symbole : elles résistent au temps et ont même le vent en poupe auprès des touristes, des commerçants et des travailleurs qui aiment s’y prélasser après une longue journée de travail.
C’est justement dans la confection de ces abris traditionnels que Chay-a Abdawa, 38 ans, mère de six enfants et présidente de la coopérative « El Wihda », a décidé d’investir. « C’est notre culture, la culture de notre peuple », confie la jeune entrepreneure, qui a su saisir les opportunités que lui offrait ce marché.
Sa petite entreprise, créée en 2000, n’avait pu atteindre son plein potentiel, malgré un marché très porteur. Mais en 2018, Chay-a Abdawa reçoit cinq machines à coudre. « Ces machines nous ont permis d’améliorer la productivité et de diminuer la fatigue. J’ai alors embauché neuf femmes, en privilégiant celles qui assument l’essentiel des charges familiales. »
Destinés à la confection des tentes, ces équipements lui ont été fournis par le Projet d’appui à la promotion des micros, petites et moyennes entreprises et à l’emploi des jeunes (PAMPEJ). Une opération financée à hauteur de 3,5 millions de dollars américains sous la forme d’un prêt et d’un don de 714 000 dollars du Fonds africain de développement. En 2017, le PAMPEJ succède ainsi au Projet de réduction de la pauvreté et au Projet de renforcement des capacités des acteurs de la microfinance.
Ce programme vient aider les jeunes et les femmes à concrétiser leur envie d’entreprendre car ce ne sont pas les initiatives qui manquent en Mauritanie. Et pour les aider à avancer, l’accès au financement est primordial. En réponse, le PAMPEJ contribue à lever les dernières barrières en dotant les bénéficiaires d’équipements grâce à une formule de crédit-bail. Il facilite aussi l’accès au micro-crédit et dispense des formations aux bénéficiaires.
A mi-parcours de la mise en œuvre du projet, le succès est au rendez-vous puisque 600 micros, petites et moyennes entreprises (MPME) ont vu le jour et que plus de 1 200 emplois ont été créés. « Cette coopérative m’a permis d’avoir un revenu stable et durable pour scolariser les enfants, leur acheter des habits. J’ai espoir que mon revenu s’améliore encore et que la coopérative continue de grandir », espère Chay-a Abdawa.
En Afrique, les MPME représentent la majeure partie des entreprises et des emplois créés. Consolider cet important pan de l’économie est essentiel pour contribuer au développement du continent. En Mauritanie, la Banque a ainsi favorisé un environnement propice à la création d’entreprise en appuyant les institutions de microfinance. Elle soutient également les structures d’accompagnement et renforce les organismes de tutelle.
Pour Benina Bint Yahya, mère de huit enfants, la situation n’a pas toujours été simple. Avec les modestes revenus de son mari, elle arrivait difficilement à joindre les deux bouts. Mais, en 2018, elle décida, avec neuf autres femmes de se regrouper dans la nouvelle coopérative « Fais ton business à côté de chez toi », pour fonder la pâtisserie « Tassamouh Lilhalawiyat ». Le projet leur a ainsi fourni fours, réfrigérateurs et autres ustensiles de cuisine. « Nous avons ensuite fait une collecte de fonds pour acheter les matières premières. Et ça a vite démarré. Nous sommes sur la bonne voie », se réjouit la jeune entrepreneure.
Grâce à ses revenus, Benina offre désormais une éducation de qualité à ses filles. Mais ce n’est pas tout. Chaque membre de sa coopérative cotise mensuellement à des caisses solidaires, conçues par les femmes elles-mêmes. L’argent ainsi épargné est ensuite reversé ponctuellement, et sans contrepartie, pour répondre aux besoins de ses membres. Benina a profité de cette épargne collective pour investir dans sa maison, là où d’autres, par exemple, ont pu honorer d’inattendues dépenses de santé. « Je subviens aux besoins de ma famille. Je fais en sorte d’éduquer mes enfants et d’améliorer les conditions des femmes autour de la coopérative. Je me sens heureuse et utile pour mon entourage », se réjouit Benina.
Au-delà de ce projet, c’est donc une mentalité qui change en Mauritanie pour laisser libre cours à un entrepreneuriat plus solidaire. En soutenant des millions d’Africains entrepreneurs, la Banque africaine de développement contribue à faire du continent une véritable terre de création, de progrès et d’innovation.
APO