Les premiers patients guinéens ont pu cette semaine bénéficier d’un nouveau traitement contre le virus Ebola, dans le cadre du début d’un essai clinique, annoncent conjointement le Ministère de la Santé guinéen, Médecins Sans Frontières (MSF) et l’Institut National de la Santé et de la Recherche (Inserm), promoteur de l’essai.
Il s’agit de l’administration d’un médicament antiviral, appelé favipiravir, au centre de traitement Ebola à Guéckédou. Dans les semaines à venir, le déploiement de l’essai se fera dans deux autres centres de traitement du virus Ebola (CTE) en Guinée : à Macenta (centre géré par la Croix Rouge Française), et Nzéréckoré (centre géré par l’association Alima).
« Toute nouvelle innovation thérapeutique contre une maladie qui tue entre 50% et 80% des personnes infectées représente un réel espoir pour les malades ; c’est pour cela que nous avons décidé d’accueillir la tenue de cette étude clinique dans notre centre de prise en charge de Guéckédou», explique Tessy Fautsch, coordinatrice médicale de MSF en Guinée.
« L’étude, menée en collaboration avec MSF, vise à rapidement évaluer l’efficacité d’un traitement contre le virus Ebola, qui a déjà causé près de 1500 morts en Guinée.», explique Xavier Anglaret, responsable scientifique Inserm de l’essai sur place à Guéckédou.
Le protocole de recherche a été préalablement partagé avec l’Organisation Mondiale de la Santé, et validé par les autorités nationales guinéennes et les comités d’éthique compétents.
Le favipiravir sera administré sous forme de comprimés pendant 10 jours. L’étude suivra les effets secondaires et indésirables, la survie à 14 jours et celle à 30 jours.
Les risques et bénéfices de ce médicament seront clairement détaillés dans la langue respective des patients, ou leurs représentants, qui consentiront à le prendre. Les malades participent à l’essai clinique sur une base volontaire et sont libres de refuser ou d’accepter de prendre ces traitements. Quelle que soit la décision, chaque patient sera de toute façon soigné, du mieux possible, comme MSF l’a fait jusqu’à présent.
Comme tout médicament utilisé pour une nouvelle indication thérapeutique, il n’existe aucune preuve avant le recueil des résultats de l’essai clinique, que ce médicament soit efficace.
« Ceci est un pas important, mais nous ne pouvons pas donner de faux espoirs à la population guinéenne, et celle des autres pays affectés en Afrique de l’Ouest. Même si cet essai montrait à terme que le favipiravir est efficace et bien toléré par les patients, cela ne suffira pas à endiguer l’épidémie. C’est la mobilisation générale des organisations et gouvernements, ainsi que l’augmentation globale du niveau de prise en charge et l’introduction de nouvelles possibilités thérapeutiques, diagnostiques, et préventives qui feront la différence », précise Tessy Fautsch, de MSF.
«La collaboration entre tous les partenaires sera essentielle pour adapter, à chaque nouvelle étape et nouvelles données, la suite de l’essai. Les chercheurs, les personnels soignants internationaux, les anthropologues ainsi que le personnel de santé guinéen travaillant sur le site sont tous des maillons indispensables à la réalisation de cette étude» conclut quant à lui, le Pr Yves Levy, Président-directeur général de l’Inserm.
Les premiers résultats sont attendus au plus tôt pour le premier trimestre 2015.
MSF est présente aux côtés du gouvernement guinéen et mobilisée dans la lutte contre l’épidémie d’Ebola depuis le début de l’épidémie, fin mars 2014. Depuis, MSF a admis 3000 personnes suspectes, dont 1600 ont été confirmées malades Ebola. 700 personnes sont sorties guéries.
Près de 800 guinéens, assistés de 83 personnels internationaux, sont actuellement mobilisés pour gérer les centres de traitement de Guéckédou, Conakry et prochainement Kankan. MSF collabore également à la préparation d’un essai clinique sur le plasma convalescent mené par l’Institut Médical Tropical d’Anvers (Belgique), qui aura lieu à Conakry début 2015.
MSF menait déjà des projets de prise en charge du VIH/sida et du paludisme depuis 2001 dans le pays.
L’Inserm s’est mobilisé depuis le début de l’épidémie Ebola pour aider à améliorer les soins des personnes atteintes par le virus, et à lutter contre l’épidémie. En avril, ce sont des chercheurs du laboratoire P4 de Lyon qui ont caractérisés les premiers la souche du virus Ebola qui sévit en Afrique de l’Ouest.
Puis, fort de son expérience passée et reconnue dans la coordination de la recherche lors de l’épidémie H1N1 en 2009 et plus récemment en réponse à l’émergence du virus Chikungunya dans les Caraïbes en 2013, l’Institut de microbiologie et maladie infectieuse de l’Inserm a pu monter le programme de recherche Ebola.
Source : MSF et Inserm