Après sa défaite du 15 décembre dernier lors de l’élection pour la mairie de Matoto, le candidat du RPG Arc-en-ciel Mamadouba Tos Camara a finalement été élu à la tête de la commune le 7 février, à l’issue d’un nouveau scrutin. Son adversaire Kalémodou Yansané, qui a boycotté l’élection, entend saisir la justice.
« Nous venons de terminer l’installation du conseil communal de Matoto. Je suis élu maire de la plus grande circonscription électorale de la Guinée par 30 voix sur 45 », s’est réjoui Mamadouba Tos Camara, arborant déjà son écharpe frappée de l’inscription « Maire de Matoto ». Ce 7 février, le nouveau scrutin organisé à huis clos au siège de l’état-civil de Matoto a mis fin à une longue bataille entre les deux candidats.
Matoto, fief traditionnel du parti au pouvoir, avait été remporté de justesse par l’opposition lors du second tour des élections communales, le 15 décembre 2018. Kalémodou Yansané, candidat de l’Union des forces démocratiques de Guinée (UFDG), avait remporté 23 voix contre 22 pour Mamadouba Tos Camara, candidat du RPG Arc-en-ciel (au pouvoir). Mais le processus avait été interrompu, suite à l’intervention d’un militant du parti au pouvoir qui contestait le résultat. Et dans la foulée, chaque candidat avait revendiqué la victoire.
Déclarant le scrutin invalide, le ministre de l’Administration du territoire, Bouréma Condé, avait convoqué une nouvelle élection le 7 février 2019, malgré les déclarations de la Cour suprême qui qualifiait ce processus d’excès de pouvoir, rappelant que le contentieux électoral pour les communes est géré par les tribunaux de première instance.
Le représentant de l’Administration du territoire a toutefois validé, cette fois-ci, la victoire de Mamadouba Tos Camara. Le nouvel maire élu a immédiatement annoncé ses priorités : « La première priorité, c’est la quiétude sociale. Faire en sorte que la population ait confiance en leurs nouvelles autorités. La deuxième, c’est l’insalubrité, qui est un mal qui gangrène. Il va falloir qu’on mette des stratégies appropriées avec des projets bancables pour que cela soit un souvenir lointain. Matoto n’a pas d’hôpitaux, n’a pas un lieu de divertissement… En tant que jeunes, on va penser à tout ça », a-t-il promis à l’issue des résultats.
Des résultats contestés
Une victoire directement contestée par son concurrent, Kalémodou Yansané, qui a choisi de boycotter le scrutin et a déjà annoncé un recours en justice pour faire annuler les résultats. « Nous allons saisir les tribunaux pour dire le droit. Pour moi, cette élection ne compte pas », a-t-il déclaré depuis son domicile, soutenant aux journalistes qu’ils ne se trouvaient « pas devant un candidat perdant, mais devant le maire de Matoto élu le 15 décembre 2018 devant toute la presse ».
Le maire déchu dénonce notamment un manque de transparence durant le scrutin. Organisé sous haute sécurité et en la présence du commandant de l’escadron mobile de la gendarmerie de Matoto, le vote s’est déroulé loin des journalistes, qui se sont vu refuser l’accès, contrairement au scrutin du 15 décembre. Les électeurs, eux, ont dû déposer leur téléphone portable avant d’entrer dans la salle.
« La presse, qui a témoigné de mon élection, n’a pas été admise dans la salle. À partir de là, ce n’est pas transparent. Qu’est-ce qu’on cache ? Nous ne nous associons pas à cela », a-t-il martelé. « Il fallait être là pour un esprit démocratique, a rétorqué Mamadouba Tos Camara. Je leur demande de venir [l’UFDG, ndlr], seule l’union peut faire la force. Au-delà des adversités, la commune est d’abord la plus importante. La population de Matoto s’attend à beaucoup d’innovations », a-t-il souligné.
Les dessous du huis clos
Parmi les partis de l’opposition présents au vote, l’UDG de l’homme d’affaires Mamadou Sylla, le PUP (ancien parti au pouvoir sous Lansana Conté), le RDIG de Jean-Marc Telliano, ancien allié du chef de file de l’opposition Cellou Dalein Diallo et le PDG, formation politique du premier président de la Guinée Sékou Touré.
Outre les voix de ses 14 conseillers, le parti au pouvoir RPG Arc-en-ciel a bénéficié de celles des sept conseillers de l’Union des forces républicaines (UFR) de Sidya Touré, conformément à une entente antérieure à la démission de son leader de son poste de Haut représentant du président Alpha Condé. Le Bloc libéral de Faya Millimouno a, à l’inverse, honoré son engagement à soutenir le candidat de l’UFDG, en déposant un bulletin nul dans l’urne. « Nous avons déjà voté pour le maire le 15 décembre », précise à Jeune Afrique un proche du parti. Selon une autre source présente lors du vote, une dizaine de personnes ont voté par procuration sur un total de 31.
JA