De passage à Paris, le président guinéen appuie la demande conjointe de Conakry, Monrovia et Freetown en faveur d’une aide internationale massive pour se relever de l’épidémie.
Quelles sont les perspectives d’éradication de l’épidémie ?
La contamination recule, mais il est plus facile de passer de cent cas à dix que de dix à zéro. Le nombre de nouveaux cas est tombé à 27 la dernière semaine de février, et nous avons bon espoir de ne plus enregistrer de nouveaux cas fin mars. Des essais démarrent ce samedi 7 mars pour tester l’efficacité d’un vaccin, le VSV Ebov, sous la supervision de l’OMS. Mais pour que l’épidémie soit considérée comme jugulée, il faut que plus aucun cas ne soit détecté dans aucun des trois pays touchés. Un seul enterrement non sécurisé peut générer de nombreux nouveaux cas. Face à ce fléau, il faut instaurer un climat d’union sacrée en Guinée.
Quel est le bilan économique de cette épidémie ?
Considérable, sans doute supérieur à 500 millions de dollars. La croissance, l’an dernier, qui aurait dû être de 4,3 %, a été gravement affectée, nous sommes en train de discuter des évaluations des organismes internationaux, dont certains estiment que cela nous a fait plonger dans une récession de 0,2 %, tandis que le Fonds monétaire international n’attend plus qu’une croissance de 0,5 % en 2015. Cette épidémie nous a frappés, alors que nous venions d’entamer une dynamique économique inédite et que nous venions de signer des contrats miniers de 30 milliards de dollars.
Beaucoup d’entreprises ont suspendu leurs activités, quoique pas toutes, à l’image d’Air France, du groupe Bolloré, d’Agrekko, d’entreprises chinoises ou russes. C’est pourquoi nous jugeons indispensable un effort international, un véritable plan Marshall pour assurer la relance économique des trois pays concernés, qui préparent leur riposte vraiment ensemble. Il faut aussi -c’est une proposition soutenue par la Commission économique des Nations unies et par l’Union africaine-, une annulation de dette, qui se monte chez nous à 1,6 milliard de dollars, car c’est comme si nous sortions d’une guerre.
La Banque mondiale va sensibiliser les bailleurs de fonds. Je remercie particulièrement la France, qui a été à nos côtés pendant l’épidémie. Il faut aussi que les investisseurs, qui commencent à revenir, sachent qu’ils seront accueillis à bras ouverts, que ce soit pour développer nos infrastructures dans le transport, l’énergie, l’éducation, la santé, ou nos industries, mines de fer et, surtout de bauxite, le tourisme, l’agriculture.
Quels sont vos projets dans le secteur stratégique de l’énergie ?
Avec son immense potentiel hydroélectrique, la Guinée peut devenir la centrale électrique d’Afrique de l’Ouest, dans le cadre de la construction du réseau d’interconnexion régional. Le barrage de Kaleta sera opérationnel en mai et nous avons des projets de barrages en cascade, à Souapiti, d’une puissance de 550 MW avec l’appui d’USAid, de la Banque mondiale, de Mubadala et des Chinois. Les études de faisabilité ont été achevées récemment. Nous avons aussi des projets à Fomi, Garafiri. Par ailleurs, nous venons juste d’intégrer le programme Power Africa lancé par Washington.
La deuxième élection présidentielle libre et démocratique de l’histoire de votre pays aura-t-elle lieu en octobre ?
Les élections auront lieu. Conformément à la Constitution, c’est à la Commission électorale nationale indépendante de préciser le calendrier, mais il est clair que nous aurons besoin d’une aide financière extérieure pour organiser le scrutin.
(Les Echos)