Dans la nuit du 26 au 27 juillet, des militaires nigériens ont annoncé avoir pris le pouvoir après avoir retenu toute la journée le chef de l’État dans sa résidence.
Ce 26 juillet, aux alentours de 23h30, l’armée a annoncé la création d’un Conseil national de sauvegarde de la patrie (CNSP), mais aussi avoir suspendu la Constitution et instauré un couvre-feu. Les frontières sont également fermées jusqu’à nouvel ordre.
C’est un certain colonel Amadou Abdramane, en tenue militaire bleue, qui a pris la parole très brièvement au nom du CNSP lors d’une déclaration filmée à la garde présidentielle, à proximité de la résidence du chef de l’État. Des éléments du général Tchiani ont ensuite amené l’enregistrement à la télévision nationale et l’ont fait diffuser. Les putschistes avaient pris soin de réquisitionner dans la journée une équipe de techniciens afin de tourner les images, qu’ils ont ensuite pu faire diffuser lorsqu’une partie de l’armée – qui contrôlait les locaux de la télévision nationale – a choisi de les rejoindre. Ils ont désormais le contrôle du média national, affirme une source loyale à Mohamed Bazoum.
« Nous avons décidé de mettre fin au régime que vous connaissez. Cela fait suite à la dégradation continue de la situation sécuritaire, à la mauvaise gouvernance économique et sociale, a déclaré le colonel Amadou Abdramane. Nous réaffirmons notre attachement au respect de tous les engagements souscrits par le Niger. Nous rassurons la communauté nationale et internationale par rapport au respect de l’intégrité physique et morale des autorités déchues conformément aux principes des droits humains. »
Incertitude autour du sort de Bazoum
Derrière le colonel se tient le général Mohamed Toumba, de l’armée de terre. Mais aussi le général Moussa Salaou Barmou, le chef des forces spéciales, ou encore le haut commandant en second de la garde nationale, Ahmed Sidian, lequel fut l’aide de camp de l’ex-Premier ministre Brigi Rafini. En revanche, le patron de la garde présidentielle qui s’est retourné contre Mohamed Bazoum, le fameux général Abdourahmane Tchiani, ne se trouverait pas sur la vidéo , au contraire de son numéro deux, le colonel Ibroh Amadou Bacharou.
Le flou entoure également, pour le moment, le sort de Mohamed Bazoum, retenu depuis ce 26 juillet au matin dans sa résidence par des éléments de la garde présidentielle. Selon nos informations, son épouse et son fils Salem sont avec lui, ses filles se trouvant actuellement à Paris.
Massaoudou chef d’un gouvernement de résistance
Aux premières heures de ce jeudi 27 juillet, Mohamed Bazoum a réagi, sur Twitter. « Les acquis obtenus de haute lutte seront sauvegardés. Tous les Nigériens épris de démocratie et de liberté y veilleront », a-t-il écrit sur son compte personnel. Un message repris également sur le compte de la présidence nigérienne.
Dans une série de messages sur les réseaux sociaux, dans lesquels il se présente comme le « chef du gouvernement par intérim », le ministre des Affaires étrangères, Hassoumi Massoudou, a lancé un appel « à tous les démocrates, à tous les patriotes, pour mettre en échec cette aventure porteuse de tous les périls pour le pays ». « Nous considérons qu’il n’y a pas de fait accompli », a-t-il par ailleurs ajouté au micro de nos confrères de France 24.
L’ancien président Mahamadou Issoufou a été placé sous la surveillance de la garde présidentielle. Il a fait des allers-retours chez le général Tchiani, qu’il a vu trois fois mercredi, mais sans succès.
L’armée divisée
Le 27 juillet au matin, une source à la présidence affirmait que le coup d’État n’était pas entièrement consommé. « Le président Bazoum reste en place », déclarait-elle à Jeune Afrique. Mohamed Bazoum et son ministre des Affaires étrangères, Hassoumi Massaoudou – désormais chef d’un gouvernement de résistance au putsch –, comptent toujours obtenir le soutien d’au moins une partie de l’armée nigérienne, laquelle se désolidariserait du Conseil national de sauvegarde de la patrie.
Cette prise de pouvoir a pris de court l’entourage de Mohamed Bazoum, où l’on comptait encore il y a peu sur le soutien d’une armée jugée loyaliste pour retourner la situation. Le chef d’état-major de l’armée nigérienne, Abdou Sidikou Issa, ne s’est pas exprimé depuis le début du putsch, pas plus que son prédécesseur, Salifou Modi, ce qui alimente les espoirs des partisans de Bazoum en un sursaut de l’armée. « C’est du 50-50 », estime un conseiller du chef de l’État, évoquant le rapport de force entre putschistes et loyalistes.
Mohamed Bazoum et Hassoumi Massaoudou – par ailleurs ancien ministre de la Défense de Mahamadou Issoufou – espèrent également pouvoir s’appuyer sur la médiation de la Cedeao et l’intervention du président béninois, Patrice Talon, qui a prévu de se rendre à Niamey ce 27 juillet.
JA