A Saint-Louis, dans le Nord de l’île, les populations sont de plus en plus exaspérées par les bars qui y ont été ouverts. De nombreuses autorisations ont été délivrées à des exploitants qui ont ouvert des boutiques de vente de boisson alcoolisée.
« Nous avons alerté les autorités sur le danger que constitue l’ouverture de telles boutiques dans notre quartier qui favorise le banditisme et la délinquance, mais notre doléance est tombée dans l’oreille d’un sourd », fulmine une sexagénaire. Exaspérées, ces populations comptent battre le macadam pour tirer la sonnette d’alarme.
En effet, les rues de Lodo sont devenues « la proie » des ivrognes et des prostituées venues de l’intérieur de la ville, comme de l’extérieur du Sénégal. La localité accueille le grand bâtiment du tribunal départemental qui semble être sous la loi de ces groupes de jeunes qui prennent l’alcool, le jour, au vu de tout le monde. Et ceci à quelques jets du temple de Thémis. Le matin comme le soir, ces « soulards investissent la rue », donnant une mauvaise image de cette ville réputée pour sa traditionnelle et légendaire éducation inculquée aux « doomu Ndar ».
Une tasse à jeter d’alcool vendue à 100 francs
A Saint-Louis, le « tapalapa » est connu de tous. D’habitude, c’est le nom donné au pain de fabrication artisanale. Mais les disciples de Bacchus se sont approprié le nom pour le donner à la dosette de boisson alcoolisée échangée pour quelques pièces. « Avec une pièce de 100 ou 200 francs, tu en as pour ton compte », lance un jeune garçon, le visage défiguré, les yeux rougis et la démarche mal assurée.
C’est un habitué des boutiques qui pullulent sur le faubourg de Sor. « Et puis, pourquoi faites-vous un reportage sur nous ? Allez voir les voleurs et laissez nous en paix !» lance-t-il. Ensuite, il tourne le dos et presse le pas, pour pénétrer dans une boutique qui fait face à la gendarmerie. « Beaucoup de jeunes meurent à cause de cette boisson », confie un sage.
« J’ai perdu mon neveu que nous avons trouvé dans sa chambre, couché sur son lit. Le médecin a révélé que c’est cette boisson qui est à l’origine de son décès», confie-t-il, la voix tremblante.
« Ils ont un regard menaçant et font peur à nos enfants qui n’osent plus mettre les pieds dans les rues pendant la nuit », se plaint Fatou Diop, demeurant à la rue Babacar Sy, près du tribunal. Ici, un jeune du nom de Paco a été mortellement poignardé, à la sortie d’un bar. Deux individus ont été agressés dans la ruelle qui se trouve derrière les bureaux des juges et du parquet.
Agressions et prostitution décorent certaines rues de l’île
Le quartier est très mal famé. Les ivrognes se soulagent dans la rue et une odeur infecte d’urine se dégage des lieux. La nuit, des groupes de jeunes garçons guettent les prostituées. Elles arrivent à bord de taxis et marchandent la passe. Un homme à l’accoutrement bizarre organise les pourparlers.
Une fois le prix arrêté, le client s’engouffre dans le taxi, pour une destination souvent inconnue. Dans cette partie de l’île, le proxénétisme connaît un essor fulgurant. Des maisons abandonnées ou non clôturées servent de plus en plus de lieux de rendez-vous.
Dans les rues, après la prière du crépuscule, des dizaines de femmes envahissent les trottoirs. Comme des bêtes affamées, ces « belles de nuit » sont à l’affût de « leur proie ». Des fois, ce sont de jeunes adolescents qui tombent sous « leur charme ».
SENEGO