Après de nombreux conciliabules et tergiversations, le parti islamiste Ennahdha a désigné son vice-président Abdelfattah Mourou pour le représenter lors de l’élection présidentielle du 15 septembre prochain. Quelles sont ses chances ?
À 72 heures de la clôture du dépôt des candidatures, la désignation d’Abdelfattah Mourou a été une demi-surprise, tant on savait le parti au référentiel islamiste divisé sur le choix de son candidat. La majorité des membres du conseil consultatif de la Choura souhaitaient en effet opter pour une figure issue de leurs rangs, tandis que le clan proche du président du mouvement Rached Ghannouchi affichait son soutien au chef du gouvernement, Youssef Chahed.
La démarche est une première pour la formation sortie de la clandestinité à faveur de la révolution de 2011. Très active, depuis, aux niveaux parlementaire et gouvernemental, elle s’est toujours gardée de se frotter au scrutin présidentiel, préférant négocier son soutien avec d’autres postulants. Mais le mouvement, qui a perdu près d’un million de voix entre le scrutin pour désigner l’Assemblée constituante et les municipales de 2018, a finalement trouvé son « oiseau rare », comme Rached Ghannouchi qualifiait il y a quelques semaines un hypothétique prétendant à Carthage.
Possible captation de l’électorat conservateur
Membre fondateur du parti et actuel président par intérim de l’Assemblée des représentants du peuple (ARP) – depuis que le titulaire du poste, Mohamed Ennaceur, a prêté serment pour remplacer provisoirement à la tête de l’État le président décédé Béji Caïd Essebsi – , Abdelfattah Mourou, 71 ans, est une personnalité consensuelle.
Avec ses costumes traditionnels, cet avocat tunisois a des allures de patriarche bienveillant. Mais cet homme débonnaire et de grande culture est d’abord un redoutable orateur rarement à cours d’arguments. Impulsif, il avait tenté en 2011 de prendre du recul vis-à-vis d’Ennahdha, mais son échec à conduire une liste indépendante à l’Assemblée constituante lui avait fait réintégrer la maison mère.
Pour certains observateurs, la candidature de Mourou pourrait sauver Ennahdha d’un revers électoral cinglant.
JA