Des centaines de personnes ont manifesté lundi à Nairobi pour dénoncer le meurtre d’un avocat, sauvagement assassiné. Trois policiers ont été placés en détention pour deux semaines, après leur comparution devant un tribunal de la capitale kényane.
À l’appel de la Commission nationale sur les droits de l’homme et du barreau kényan, plusieurs centaines de personnes se sont réunies ce matin, lundi 4 juillet, dans le centre de Nairobi, pour réclamer l’arrêt des « exécutions extrajudiciaires », après le meurtre de Willie Kimani, un avocat spécialisé dans la défense des droits de l’homme.
La plupart des manifestants avaient revêtu des t-shirts avec l’inscription « arrêtez les exécutions par la police » écrites en lettres couleur sang. D’autres portaient des pancartes avec les photos des trois hommes tués.
Les manifestants devaient présenter ensuite au président Uhuru Kenyatta et au chef de la police, Joseph Boinnet, une pétition comprenant un certain nombre de demandes, certains allant jusqu’à réclamer la démission du ministre de l’Intérieur, Joseph Nkaissery ou celle du chef de la police.
Trois policiers comparaissent devant la justice
Les trois policiers arrêtés vendredi, ont été présentés lundi devant un tribunal de Nairobi. À la demande du parquet, le sergent Fredrick Leliman, le caporal Stephen Chebulet et l’agent Silvia Wanjiku, ont été placés en détention, et ce pour une durée de deux semaines, le temps qu’une autopsie ait lieu et que l’enquête soit menée à son terme.
Le corps de Me Kimani, disparu le 23 juin avec son client Josephat Mwenda et leur chauffeur de taxi Joseph Muiruri, avait été retrouvé mutilé dans la rivière Ol Donyo Sabuk, au sud-est de la capitale. Selon la presse kényane, ses poignets avaient été attachés, trois de ses doigts coupés et ses yeux énucléés.
Appel à la grève
Les avocats kényans ont annoncé qu’ils seraient en grève cette semaine dans tout le pays, pour protester contre l’assassinat de leur collègue.
« Nous rejetons absolument l’idée que ce qui est arrivé aux trois hommes qui ont disparu la semaine dernière est un cas isolé impliquant quelques officiers ripoux. Beaucoup, beaucoup de Kényans ont disparu et c’est une situation qui est complètement intolérable », a déclaré le président du barreau kényan, Isaac Okero.
« Ces meurtres extrajudiciaires sont un rappel effrayant que le droit, durement gagné, de chercher justice pour des violations des droits de l’homme est à nouveau menacé », a déploré de son côté Muthoni Wanyeki, directrice pour l’Afrique de l’Est chez Amnesty International, l’une des trente-quatre organisations internationales de défense des droits de l’homme à avoir demandé aux autorités de faire toute la lumière sur ces meurtres.
Escadrons de la mort
La police kényane est régulièrement accusée de mener des opérations violentes et hors procédure contre des personnes enquêtant sur les abus perpétrés par ses membres. Devant ces accusations, le chef de la police, Joseph Boinnet, a rejeté en bloc l’existence d’ « escadrons de la mort au sein de la police » soupçonné par l’opposition d’être derrière ces meurtres.
Ces meurtres, dont les auteurs n’ont pas toujours été retrouvés, inquiètent de nombreux observateurs à l’aube d’une année électorale tendue. Plusieurs diplomates occidentaux craignent que se répète le scénario de 2007-2008, lorsque plus de 1 100 personnes avaient été tuées dans des violences postélectorales.
JA