L’Irak entame lundi trois jours de deuil national en hommage aux victimes de l’attentat-suicide perpétré à Bagdad dimanche. Revendiqué par l’État islamique, celui-ci a fait plus de 200 morts dans un quartier commerçant de la capitale.
Ce deuil national a été annoncé par le bureau du Premier ministre irakien Haider Al-Abadi. Celui-ci s’est par ailleurs rendu sur les lieux du drame et a promis d’en « punir » les responsables. Mais, l’attentat de dimanche 3 juillet, dont le bilan est le plus lourd dans la capitale irakienne depuis un an, met en lumière l’incapacité du pouvoir irakien à instaurer des mesures de sécurité efficaces à Bagdad.
L’Irak reçoit pourtant l’aide de la coalition internationale dirigée par les États-Unis, qui entraîne les forces irakiennes dans le cadre de la lutte anti-jihadistes. Haider Al-Abadi a donc annoncé dimanche la modification des mesures de sécurité, notamment le retrait des détecteurs d’explosifs, dont l’efficacité avait été mise en doute.
Le Premier ministre a aussi ordonné au ministère de l’Intérieur d’accélérer le déploiement du « dispositif Rapiscan pour la recherche de véhicules » à toutes les entrées de Bagdad, et interdit l’utilisation des téléphones portables au personnel de sécurité en service.
« Ici, je ne sais pas contre qui je dois lutter »
Un kamikaze de l’État islamique avait fait exploser dimanche avant l’aube une voiture piégée dans une rue bondée du quartier commerçant de Karrada, où de nombreux habitants faisaient leurs courses avant la fête marquant la fin du mois sacré musulman du ramadan. Selon des responsables de la sécurité, plus de 200 personnes ont été tuées et plus de 180 blessées dans cet attentat.
L’énorme déflagration a provoqué des incendies dans plusieurs immeubles et échoppes. Des hommes ont dégagé les corps de deux victimes de l’un des bâtiments en feu dans la rue jonchée de gravats et de débris. Hussein Ali, un ancien soldat de 24 ans, a affirmé que six employés dans un magasin appartenant à sa famille avaient été tués et leurs corps carbonisés. « Je vais de nouveau rejoindre le champ de bataille. Au moins là-bas je connais l’ennemi et je peux le combattre. Mais ici, je ne sais pas contre qui je dois lutter », a-t-il raconté.
Les rues du quartier étaient jonchées de décombres et la recherche puis l’identification des victimes pourraient être très longues. « Dans les listes de victimes que j’ai vues, des familles entières – le père et ses fils, la mère et ses filles – ont été anéanties par l’explosion », a déclaré un membre des forces de défense civile. « Nous aurons besoin de plusieurs jours pour retrouver les corps des victimes », a-t-il dit.
« Un acte lâche et odieux aux proportions inégalées », selon l’ONU
Dans un communiqué diffusé par SITE, le centre américain de surveillance des sites jihadistes, l’État islamique, a déclaré qu’un kamikaze irakien avait fait exploser une voiture piégée près d’un rassemblement de chiites, communauté musulmane majoritaire en Irak et considérée comme hérétique par l’organisation terroriste.
Malgré ses revers militaires sur le terrain face aux troupes gouvernementales, celle-ci parvient à commettre des attentats très meurtriers au milieu de rassemblements civils. Cette attaque intervient une semaine après la perte par les jihadistes de leur fief de Fallouja, à 50 kilomètres à l’ouest de Bagdad, tombé le 26 juin aux mains des troupes pro-gouvernementales soutenues par la coalition internationale, après une offensive de plusieurs semaines. Avant dimanche, la dernière attaque majeure à Bagdad remontait au 17 mai : un double attentat contre deux quartiers avait fait près de 50 morts.
L’envoyé de l’ONU pour l’Irak, Jan Kubich, a condamné l’attentat, un « acte lâche et odieux aux proportions inégalées ». À l’étranger, le président français François Hollande a dénoncé « l’œuvre de criminels abjects » et redit sa « détermination absolue à les combattre partout ». L’attaque « ne fait que renforcer notre détermination à soutenir les forces de sécurité irakiennes », a déclaré le porte-parole du Conseil national de sécurité américain, Ned Price.
AFP