Conakry, 16 novembre 2015–Aly Mansaré est âgé de 2 ans, il n’a jamais pu marcher. Sa mère, Hawa Condé, s’occupe de lui du mieux qu’elle peut avec le petit commerce qu’elle tient à Kassadou, un village situé à 68 Km de Guéckédou. Mohamed Camara a quant à lui 21 ans et vit à Siguiri. Il a vécu une expérience similaire. S’exprimant lors du lancement de la campagne locale de vaccination contre la poliomyélite, Mohamed a souhaité relater son histoire : « Mes parents m’ont expliqué que j’étais un enfant normal jusqu’à l’âge de 2 ans. Une nuit, j’ai eu une forte fièvre et deux jours plus tard je n’arrivais plus à bouger mes membres inférieurs. Depuis ce jour, je suis handicapé et je suis obligé de vivre de cette manière. »
Aly et Mohamed sont tous deux victimes de poliomyélite, une maladie infectieuse et contagieuse due à un virus qui attaque le système nerveux. Les paralysies qui en découlent atteignent les membres inférieurs en général, avant de monter ensuite le long du corps. Chez les enfants atteints, la polio peut ralentir la croissance des muscles malades, d’où des difformités : scoliose, cyphose, jambe plus courte, etc. Les médicaments connus ne sont pas efficaces la poliomyélite, qui ne peut être éradiquée qu’à travers la vaccination systématique des enfants de 0 à 5 ans.
Hawa Condé, la mère d’Aly, regrette de n’avoir pas amené son fils au centre de santé pour qu’il soit vacciné contre la polio. « Lorsque mon fils est né, il était très petit. J’ai accouché de lui deux mois avant la date normale et à cause de sa petite taille, j’avais trop honte de l’amener au centre de santé. Les gens allaient se moquer de lui ; tous ceux qui le voyaient se moquaient. J’avais trop honte, c’est pour cela qu’Aly n’a pas eu de vaccin. Si c’était aujourd’hui, je n’allais pas le garder à la maison, j’allais l’amener chez le docteur pour le protéger contre cette maladie et pour qu’il puisse être normal et heureux comme tous les autres enfants. »
Mohamed Camaralance un message aux pères et aux mères de famille: « Me voici à 21 ans, je n’ai rien pu faire de ma vie. Je ne suis même pas allé à l’école, je ne sais rien faire, je me sens vraiment inutile. Je souhaite que cette maladie s’arrête à moi et qu’elle n’arrive à personne d’autre. Je demande à tous les parents et tuteurs de faire vacciner les enfants pour qu’ils ne soient pas condamnés. »
En Guinée, une nouvelle forme injectable de vaccin contre la polio dénomméeVPI (Vaccin Polio Injectable) vient d’être introduite dans le PEV (Programme Elargi de Vaccination) de routine, en partenariat avec l’UNICEF et l’OMS sous financement de l’Alliance Globale pour les Vaccins et l’Immunisation (GAVI). Le lancement officiel du VPI a eu lieu le 05 novembre 2015 dans la commune de Matoto à Conakry.
Plusieurs mères ont fait le déplacement à Matoto le jour du lancement du VPI. C’est le cas de Rouguiatou Diallo, résidente au quartier Kobaya dans la commune de Ratoma « J’ai pris le temps de venir jusqu’ici et vacciner mon enfant pour le garder en bonne santé. Ce vaccin est une arme de guerre contre la polio donc je demande aux mamans d’envoyer tous leurs enfants au centre de santé le plus proche pour qu’ils reçoivent ce vaccin. »
Le Représentant de l’UNICEF, Dr Mohamed Ag Ayoya, a saisi l’occasion pour réitérer l’engagement de son institution à accompagner le Gouvernement dans son combat pour les enfants. Il a invité les parents à la bonne collaboration avec les services de santé et à protéger leurs enfants contre la polio en les faisant vacciner : « Ce vaccin est sûr, facile à administrer, et il évite aux enfants d’être paralysés à vie par cette maladie. Nous devons faire vacciner tous les enfants, où qu’ils soient, et nous donner les mains pour que la Guinée soit indemne de polio. »
Pour cette campagne, l’UNICEF a fourni 171 200 doses de vaccins et a appuyé la formation de 940 agents de première ligne dans les communautés.
Après une accalmie notée en 2007 et 2008, 42 cas de polio ont été enregistrés en Guinée en 2009. Enaout 2011, trois cas de polio ont été notifiés, suivi d’un cas en 2014 et en septembre 2015 dans la préfecture de Siguiri. Ce cas a conduit le Gouvernement à organiser une riposte en trois tours de vaccination pour l’année 2015, dont deux ont déjà été mis en œuvre. La persistance de la poliomyélite montre la nécessité de redoubler d’efforts pour renforcer les systèmes de vaccination de routine et lutter contre les disparités dans l’accès des enfants aux services de santé de base.